En démocratie, une voix de majorité suffit. Au Parti socialiste, avec une centaine de voix d' avance pour Martine Aubry, le compte pourtant n' y est pas. Ce score très serré exigerait en effet que les conditions d' obtention de la victoire soient irréprochables. Les bulletins, de plus, ne doivent pas encourir, comme c' est le cas ici et pour les deux camps, le soupçon d' être des bulletins de trop, entachés de fraude ou bourrés dans les urnes.
Le Parti socialiste a beau être, de toutes les formations politiques françaises, celle dont les procédures internes sont les plus transparentes, personne n' ignore plus aujourd'hui qu' il n' est pas le modèle démocratique qu' il prétendait être. Bien des turpitudes sont maintenant étalées au grand jour : délivrance de fausses cartes, listes d' émargement introuvables, votes oubliés et retrouvés par miracle. L' opération de récolement des votes fut une pantalonnade. Ce serait drôle si...
La fraude électorale dans les fédérations, voilà bien un sujet sur lequel les responsables socialistes ont laissé croître l' herbe. Sauf quand la triche atteignait des sommets, tout le monde au PS s' en accommodait. Car, dans le vieux parti, il était admis que la légitimité ne pouvait pas sortir toute casquée des urnes. Elle procédait depuis toujours d' une mécanique des fluides où le vote militant, même librement exprimé, se trouvait canalisé par le rapport de force des courants, lui même surdéterminé par le poids des fédérations.
C' est ce qui, depuis le congrès d' Epinay, a permis de dégager des majorités et toutes les synthèses. Il en a été ainsi jusqu' à cette petite merveille d' horlogerie fabriquée au Mans par François Hollande, dont le dérèglement déclencha une machine infernale qui vient d' exploser en deux temps : aux primaires de 2007 et au congrès de Reims en 2008.
La primaire de 2007, entre trois candidats issus de la même majorité, avait en effet déjà sérieusement mis à mal le système. L' issue du scrutin n' était pas un choix d' idées mais de personnes.
A cette occasion, il ne fut plus possible de dissimuler une contradiction majeure dans les rangs socialistes : leur conversion, effrontément niée, à la présidentialisation du régime et à la présidentialisation de leur parti.
Sinon, pourquoi avoir adopté le quinquennat et l' inversion du calendrier pour les législatives ?
Ces deux réformes institutionnelles consacrèrent définitivement l' élection présidentielle comme la seule clef de l' alternance. Sinon, pourquoi organiser hier des primaires internes et élire aujourd'hui au suffrage universel direct le premier secrétaire ?
Ce n' est pas le moindre des mérites de Ségolène Royal d' avoir tiré, sans hypocrisie, les conséquences de cette évolution en plaidant pour l' élargissement de la base militante du PS et en recherchant, ce qui lui est reproché, une mobilisation partisane autour de sa personne.
Martine Aubry fait d' ailleurs la même analyse sur la personnalisation du pouvoir au PS, mais sans l' avouer.
Pour cette raison, elle a finalement préféré se lancer seule au congrès de Reims plutôt que de rechercher une synthèse avec d' autres.
C' est ce qui l' affaiblit aujourd'hui.
Son score, étriqué, n 'aurait pas été contestable si elle avait trouvé un accord avec Bertrand Delanoë ou Benoît Hamon et construit une majorité.
Au lieu de cela, sa légitimité reste adossée au résultat de sa motion (25 %) et ne tient qu' à une poignée de suffrages.
Une chose est sûre : quand bien même le traumatisme électoral serait surmonté, le PS est devenu ingouvernable. L' épisode dramatique que le parti traverse montre d' ores et déjà que l' élection au suffrage universel du premier secrétaire, quand les autres instances dirigeantes du parti sont formées au prorata des suffrages obtenus par chaque motion, est une absurdité.
Deuxième leçon de cette crise, il n' est pas possible que le PS puisse prétendre organiser des primaires à gauche, s' il ne fait pas un grand ménage chez lui pour devenir à la fois une grande formation populaire et une formation vraiment démocratique.
Le PS souffre à la fois de ne pas ressembler à la société de ses électeurs et de ne pas incarner la communauté de ses militants.
Il est écartelé entre plusieurs caractéristiques contradictoires. Comme machine électorale pour les présidentielles, il est un "parti attrape-tout" qui s' adresse plus à des sympathisants qu' à des adhérents. Il est surtout un parti d' élus, ce qui explique la dissociation souvent problématique entre les attentes de sa base militante et les préoccupations de la direction. Enfin, son fonctionnement est de plus en plus affecté par l' autonomie des fédérations en roue libre.
Le PS a du mal à drainer et à fidéliser ses sympathisants parce qu' il apparaît trop fermé sur lui-même. Le nombre d' adhérents au PS stagne. Le renouvellement des militants est problématique. La cotisation réduite à 20 euros avait permis de porter le nombre des adhérents de 130 000 à 210 000 en 2007 mais la déception engendrée par la défaite à la présidentielle et les terribles divisions du PS ont suscité depuis une hémorragie chez les nouveaux venus et les anciens militants dégoûtés.
D' où un parti réduit pratiquement de moitié à la veille du congrès de Reims et un fort taux d' abstention au moment du vote des motions. Le mal est profond et ne peut qu' empirer sans une régénération profonde du parti.
Depuis plusieurs années, le parti, ses fédérations, ses sections, semblent s' être claquemurés avec les résultats que l' on connaît. Le PS est une machine électorale moyennement efficace pour la présidentielle. Les fédérations vivent fermées sur elles-mêmes et verrouillent les investitures, tant pour les mandats locaux que pour les mandats nationaux et européens, ce qui est déraisonnable. Le Parti socialiste s' étiole. Il se vide par le bas. Il ne parvient pas à recruter en nombre des adhérents ni à garder les nouveaux. Il s' ossifie par le haut : il peine à diversifier l' origine et à rajeunir la population de ses élus.
Le PS doit prohiber certaines pratiques qui affectent son fonctionnement démocratique. La sélection des adhésions ne doit pas être un moyen d' obtenir des votes bloqués. Il est important que le contrôle des élections puisse à l' avenir être correctement assuré. Il faut enfin corriger le poids excessif de certaines fédérations qui sont historiquement accoucheuses de congrès. Il y a, en effet, au PS des bourgs pourris comme en comptait autrefois le Royaume-Uni.
Du coup, le pays légal des socialistes n' est pas leur pays réel. Que les congrès dépendent de quatre ou cinq grosses fédérations, sur une centaine, qui sont surreprésentées est une hérésie.
Il faut en finir avec certaines formes de clientélisme politique d' un autre âge, avec certaines pratiques politiciennes.
C' est à quoi doit s' atteler en priorité la direction qui va prendre les commandes Rue de Solférino, tout son crédit en dépend. Le PS a besoin d' un vrai renouveau. Qu' on ouvre les portes, qu' on respire ; et basta les combines !
Louis Gautier est délégué national du Parti socialiste.
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Mes amis socialistes ont donné un triste pourtant, pourtant ce parti est un parti démocratique, certainement plus ouvert, plus clair que d' autres, en particulier l' UMP.
J' espère que 2006,2007 et 2008 trois années déplorables pour l' image des socialistes et de leur parti seront vite oubliées, que la nouvelle Direction saura nettoyer certaines règles, que des mauvaises et vieilles pratiques seront éradiquées.
Et que les militants, les adhérents auront leur mot à dire et que les adhésions reprennent pour en faire un vrai parti démocratique.
1 commentaire:
Même si le nombre d'adhérents peut en faire un parti plus fort et riche, n'es-tu pas d'accord sur le fait, comme le soulignait une personne à une réunion, que les militants qui votent devraient avoir participé au moins à un débat dans leur section afin d'éviter les adhérents de "complaisance" ou autre ?
Et un tarif progressif de l'adhésion ? 45 euros, c'est trop cher et 20 pour tous injuste. Certains ne sont venus voter parce que c'est trop cher. J'en connais
Amitiés
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